(j’ai pris cet article sur le site handicap.fr)
Cette mesure était revendiquée depuis plus de 15 ans par les associations, depuis que la Prestation de compensation du handicap existe. Dès le 1er janvier 2021, la PCH parentalité est entrée en vigueur. Le décret 2020-1826 paru au Journal officiel le 31 décembre 2020 officialise ce nouveau volet. Cette aide va permettre aux personnes qui sont déjà bénéficiaires de la PCH aide humaine d’être assistés dans leur rôle de parent au quotidien, dès la naissance de leur enfant. Elle porte à la fois sur une aide humaine (par exemple langer un bébé, lui donner à manger, lui faire prendre son bain, emmener un enfant à l’école) et les aides techniques (poussette adaptée au fauteuil, salle de bain et lit…). Sa mise en œuvre concrétise l’engagement du Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap du 11 février 2020. 17 000 parents seraient concernés selon un rapport de l’Igas (Inspection générale des affaires sociales) de 2016, peut-être davantage.
Quels montants ?
Cette nouvelle prestation va ainsi permettre de rémunérer, par exemple, un intervenant au domicile (voir modalités précises dans l’interview du secrétariat d’Etat au Handicap). Le montant est fixé à 900 euros par mois lorsque l’enfant a moins de 3 ans et à 450 euros entre 3 et 7 ans. Les familles monoparentales bénéficient d’une majoration de 50 %, soit, respectivement, 1 350 et 675 euros selon l’âge. S’y ajoutent les aides forfaitaires pour l’acquisition de matériel spécialisé de puériculture qui sont allouées automatiquement au parent bénéficiaire de la PCH lors de la naissance de son enfant, puis aux troisième et sixième anniversaires ; leur montant atteint donc 3 600 euros dans les six premières années de l’enfant. Selon Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat au Handicap, il s’agit d’un « vrai levier pour rendre concrets et effectifs les droits des personnes en situation de handicap de fonder ou agrandir une famille». La Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2021 prévoit une enveloppe dédiée de 200 millions d’euros.
Avancée historique mais…
Les associations du champ du handicap se félicitent de cette avancée historique, 74 personnes sur 100 au Cncph (Conseil national consultatif des personnes handicapées) ayant signé ce projet de texte, même si l’Unapei déplore « comme à bien d’autres occasions, l’urgence de la saisine du Conseil ». Pourtant, ce « nouveau droit ne peut cacher de fortes déceptions », explique le Collectif handicaps qui réunit une cinquantaine d’entre elles. En premier lieu, le fait que cette prestation soit un forfait égal pour tous et ne réponde pas aux besoins de manière individuelle ; la commission du Cncph n’avait d’ailleurs donné un « avis favorable » qu’à cette condition. « En 2021, quelle que soit la situation, tout le monde est logé à la même enseigne. Et pour ceux qui ont besoin de plus, voire de beaucoup plus, ce qui est souvent le cas dans notre association, ils se débrouillent », déplore Malika Boubekeur, conseillère nationale compensation d’APF France handicap. Les sommes allouées correspondent à 1 heure par jour, en moyenne, entre 0 et 3 ans et 30 minutes entre 3 et 7 ans. Et ce quel que soit le nombre d’enfants. Donc pour un, deux, trois ou quatre, c’est un seul forfait, calqué sur l’âge du plus jeune. « Trop peu », pour le Collectif handicaps pour qui l’individualisation de cette prestation « doit rester la règle ». Et de citer l’exemple du département d’Ille-et-Vilaine qui accorde, dans le cadre d’un dispositif extra-légal, 5 heures par jour d’aide humaine au titre de la parentalité jusqu’aux 3 ans de l’enfant puis 2 heures par jour jusqu’à ses 7 ans.
Un forfait pour parer à l’urgence
Le gouvernement répond avoir opté pour un forfait pour permettre une mise en place rapide en simplifiant les démarches des Maisons départementales des personnes handicapées, a fortiori en temps de Covid, ce que confirme Dominique Lagrange, président de l’Association des directeurs de MDPH. Il dit avoir « bien conscience qu’une réponse individualisée nécessite une évaluation qui prend du temps », d’autant que, même avec le système forfaitaire, le « SI (système d’information) risque de ne pas être opérationnel avant plusieurs semaines pour ne pas dire mois… Il va donc falloir trouver un dispositif qui permet d’apporter une réponse aux personnes dans les meilleurs délais ». Ce forfait ne serait donc que « transitoire », le gouvernement promettant de mettre en place un groupe de travail pour assurer le suivi de ce dispositif en 2021 et de revoir, éventuellement, sa copie en 2022 afin d’évoluer vers une attribution individualisée. Cette promesse ne rassure pas Malika Boubekeur : « Le transitoire qui dure, on l’a connu avec les fonds de compensation. On nous avait dit la main sur le cœur en 2006, c’est du transitoire…. Quinze ans après, les décrets ne sont toujours pas parus ».
D’autres points de discorde
Le Collectif handicaps regrette également que cette PCH parentalité ne soit accessible qu’aux personnes percevant déjà le volet aide humaine de la PCH, excluant, de fait, celles en situation de handicap, notamment psychique ou mental, qui restent majoritairement peu ou non éligibles. Selon Autisme France, « les parents autistes en sont exclus, alors même que les travaux sur les critères d’éligibilité de la PCH à ces publics sont largement en panne ». Les conclusions de la mission confiée au Docteur Leguay à ce sujet sont néanmoins attendues au premier trimestre 2021.
Autre point de discorde, le fait que cette aide cesse aux sept ans de l’enfant. « Après, débrouillez-vous !, raille Malika Boubekeur. Nous ne voulions pas de limite d’âge et celle-ci est trop basse… » Même son de cloche du côté de l’Unapei, qui juge que « la parentalité nécessite, pour certaines familles, un accompagnement au long cours, souple, qui ne cesse pas brutalement à l’âge de 7 ans ».
Enfin, le financement de la PCH parentalité se fera en 2021 par une avance des départements, « ce qui laisse peser certains doutes sur l’effectivité du droit dans l’ensemble d’entre eux », s’inquiète le Collectif handicaps.